VAHRAM ZARYAN COMPAGNIE “LA TETE EN BAS “

Libre adaptation du roman de  Noëlle Châtelet par la Compagnie Vahram Zaryan

                                  
                     (extrait publié aux éditions du Seuil)
Je n’ai plus de couteau à la main : je n’ai plus de
main. Je ne crie plus : je n’ai plus de voix. Je ne
mords plus : je n’ai plus de dents. Je ne pleure plus :
je n’ai plus de gorge où gémir, mes larmes à l’intérieur.
Je n’ai plus de corps. Ni ange, ni prince, plus
de corps. Je suis pensée.
Pure pensée.
Plus de corps, plus d’obstacle. Rien qui encombre, rien qui
s’interpose. Je suis sorti de   l’embarras du corps.
Pensée libre. Étonnement de ne pas éprouver, de ne
souffrir de rien. J’en veux, de cette abstraction qui
fait que je ne ressens plus. Mon corps, s’il existe, ne
m’est plus accessible, comme si, à force de cher-
cher les cimes, l’en-haut l’avait avalé, aspiré.
Depuis que la matière m’a fui, tout est simple. La
souffrance m’a quitté en même temps que mon
corps. La souffrance était donc là, dans mon corps
Si c’est cela la folie, j’en veux bien, de la folie, y rester aussi,
rester toute la vie à ne ressentir rien.

 Noëlle Châtelet





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